Gérald Darmanin, ministre de la Justice, a présenté pour la première fois ses excuses aux supporters de Liverpool qu’il avait accusés d’être à l’origine des troubles provoqués aux alentours du Stade de France avant la finale de la Ligue des champions 2022 contre le Real Madrid.
Des excuses trois ans après. Dans une interview à la chaîne YouTube Legend, Gérald Darmanin, ministre de la Justice, a reconnu avoir commis une erreur de communication en accusant les supporters de Liverpool d’avoir été à l’origine des troubles autour du Stade de France avant la finale de la Ligue des champions face au Real Madrid, le 28 mai 2022. Alors ministre de l’Intérieur, il explique avoir réagi à une “idée pré-conçue” tout en se basant sur des remontés d’informations imprécises. Il regrette également avoir mal préparé cet évènement qui devait initialement avoir lieu à Saint-Pétersbourg. Il avait été attribué au Stade de France, en février, après avoir été retiré à la ville russe après l’invasion de l’Ukraine.
“On s’est trompé de dispositif, on s’attendait à une guerre de hooligans et on a eu des gens qui sont venus faire des rackets”
“A l’époque, je m’étais peut-être un peu endormi sur mes acquis, je ne m’étais pas dit: ‘tiens, ça peut être un problème’”, confie Gérald Darmanin. “La vérité est que dans la vie, il y a des problèmes tous les jours. Là, j’étais peut-être un peu prétentieux, habitué…” Dans l’interview, le ministre explique avoir mis du temps à prendre la mesure d’un problème même s’il s’était retrouvé totalement à l’arrêt sur l’autoroute A1 aux abords du Stade de France avant la rencontre.
“J’arrive au stade dans une ambiance bizarre mais quand vous êtes ministre de l’Intérieur, vous entrez par le parking, vous ne voyez pas très bien la confusion”, explique-t-il. “Le préfet de police n’était pas là. Je vois bien qu’il y a un problème, qu’il y a quinze minutes de retard (pour le coup d’envoi). Je vois bien que c’est un sujet, le stade n’est pas plein. Au bout d’un quart d’heure, je me dis: ‘ça ne va pas du tout’. Le type en charge de la sécurité n’est pas au poste de sécurité. On monte au poste de sécurité où c’est la confusion, les flics font ce qu’ils peuvent. On voit sur les images de vidéo surveillance, une foule rouge de supporters de Liverpool, agglutinés contre les grilles et des CRS qui les retiennent.”
“Notre dispositif de sécurité n’est pas du tout prévu pour ça”
“On me dit qu’il y a un mouvement de foule”, reprend-il. “C’est Liverpool, un immense club mais c’est aussi le hooliganisme anglais. Le ministre de l’Intérieur en France, son sujet, c’est le hooliganisme. L’analyse que nous faisons dans un premier temps, c’est ‘ils foutent le bordel’. C’est ce que j’apprends au poste de sécurité, c’est ce que m’apprend le préfet de police qui m’a depuis rejoint, c’est ce que montrent les images. On chope aussi des gars avec des faux billets parce qu’à l’époque c’étaient des billets en papier. De faux billets avaient été vendus et bloquaient l’entrée.”
“J’apprends qu’il y a eu un problème de RER qui a bloqué une partie des personnes sous un tunnel”, ajoute-t-il. “Ce que je ne sais pas ce soir-là, c’est que l’essentiel de la difficulté ne vient pas des supporters anglais mais des délinquants de Seine Saint-Denis qui font des razzias et pillent des supporters. Notre dispositif de sécurité n’est pas du tout prévu pour ça. Ce sont des CRS, des gendarmes mobiles avec des grosses bottes et des boucliers, ce n’est pas terrible pour courir. Pour lutter contre la délinquance, il faut des mecs de la bac en baskets, on s’est trompé de dispositif, on s’attendait à une guerre de hooligans et on a eu des gens qui sont venus faire des rackets.”
“Le coupable était facile et je m’en excuse auprès des supporters de Liverpool”
Il résume. “L’addition des conneries, le RER en panne qui ont mis les gens de Liverpool dans une seule entrée, le fait que des billets cassaient le rythme et une délinquance qu’on n’a pas su gérer… fait que lors de la première sortie publique je dis ce qu’on m’a dit: ‘les Anglais foutent le bordel’. Ce n’était pas entièrement faux parce qu’il y avait eu des faux billets, des agressions côté policier mais ce n’était pas vrai au sens littéral du terme. Le première cause de difficulté, c’étaient les délinquants qui attaquaient les gens qui allaient au Stade de France. “
“Une fois que vous êtes sortis médiatiquement sur une information qui n’est pas fausse littéralement mais qui apparait comme fausse pour le commentaire classique, on dit: ‘il ment, il cache la vérité pour ne pas dire que ce sont les jeunes des quartiers qui ont attaqué les Anglais’. Vous avez beau dire: ‘il n’y a pas de blessé grave, pas de mort’, les gens s’en foutent et disent que c’est un fiasco. (…) c’est un échec parce que je n’avais pas bien prévu, c’est une erreur de ma part, je n’avais pas bien vérifié ce qu’il se passait. J’ai péché par idées reçues. Le coupable était facile et je m’en excuse auprès des supporters de Liverpool.”
“Ils l’ont mal pris et ils on eut raison”, conclut-il sur le sujet. “C’était une erreur et un échec. (…) J’ai mis du temps à me dire: ‘qu’est-ce que j’ai raté?‘ et on ne m’y a pas repris à deux fois.”